lundi 5 novembre 2012

Tous à l'asile !

Moi qui ne suis pas férue de romans policiers, j'ai pris plaisir à lire Au temps pour moi de Serge Scotto, écrivain marseillais. Ce n'est pas le genre de polar que l'on lit en diagonale : le style vaut la peine qu'on prenne le temps de savourer chaque phrase, de dégoter entre les lignes le deuxième degré, bon mot après bon mot. C'est d'ailleurs l'un des thèmes de ce roman : le mot juste et la chasse aux fautes, comme on ferait la chasse aux sorcières à coups de bons à tirer. On sent l'amour de la langue (souvent mauvaise langue) et du bon usage du français, exemples à l'appui. Dans une mise en abyme burlesque des romans dans le roman, Serge Scotto se moque de lui-même comme des autres, professionnels du livre et écrivains à posture. Sa gouaille et sa dent dure font rire jaune ou de bon cœur tant on passe de la lucidité à l'outrance, de la réalité à la fiction, de la tragédie à la farce. Et pour cause : le narrateur, Herbert Turaive, écrivain et tueur à gages, est un psychopathe et un misogyne surnaturel qui prend souvent ses désirs pour la réalité (comme son nom l'indique). Après un bref séjour à New York, Marseille est le théâtre de ses aventures délirantes :
"(...) je crois carrément que Marseille rend cinglé, à l'usage !... Assurant sa propre production de jobards, selon une recette tenue secrète, comme celle des navettes et du Coca-Cola ! En tous cas il est clair que chez nous, les fous se sentent comme chez eux : on en croise de toute sorte, à longueur de journée à chaque coin de rue, comme nulle part ailleurs... Marseille, terre d'asile !"
Une histoire de fous furieux où la part d'ombre de l'humanité n'est jamais loin des places au soleil, et où les plus dangereux ne sont pas toujours à l'ombre.
Éditions L'écailler, 2012, 164 pages.

Suite de Gagnant à vie, Au temps pour moi ne serait que le deuxième (pour l'instant, le second) d'une série à venir, avec Herbert Turaive pour héros déjanté.

Éditions L'écailler, 2008, 196 pages.


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