dimanche 28 novembre 2010

Des nouvelles de Carver ?

Raymond Carver a le chic pour nous raconter des histoires dramatiques avec de jolis titres : "Les vitamines du bonheur", "Une petite douceur", "Parlez-moi d'amour"...
Ses personnages vacillent au bord du précipice, démunis à tous points de vue, leurs rêves abandonnés loin derrière... Les dialogues brefs pèsent des tonnes.
Carver capte une atmosphère avec trois fois rien, un détail sculpté ("carver" signifie "sculpteur") en quelques mots. Noirs, très noirs, mais bruts, sans pathos.
Il est considéré comme un spécialiste de la nouvelle, c'est-à-dire de l'histoire courte et tragique, comme la sienne, puisqu'il est mort à 50 ans, noyé de l'intérieur dans l'alcool.
Bon, je ne voudrais pas vous décourager mais c'est tellement réaliste que cela vous prend à la gorge et vous happe en entier.
Vous m'en direz des nouvelles...

En France, les éditions de l'Olivier publient l'œuvre complète de Raymond Carver.

samedi 27 novembre 2010

Indigènes de tous pays, indignons-nous !

Stéphane Hessel, 93 ans, est un homme très Résistant et indigné depuis le nazisme (et sûrement avant) car le "motif de base de la Résistance, c’était l’indignation". Contrairement à ce qu'on pourrait croire en temps de paix, aujourd'hui, les raisons de s’indigner ne manquent pas. "Cherchez et vous trouverez", incite-t-il : "l’écart grandissant entre les très riches et les très pauvres, l’état de la planète, le traitement fait aux sans-papiers, aux immigrés, aux Roms, la course au "toujours plus", à la compétition, la dictature des marchés financiers et jusqu’aux acquis bradés de la Résistance : retraites, Sécurité sociale…"
En plus, j'aime bien ce monsieur amoureux de poésie qui a écrit une anthologie "Ô ma mémoire : la poésie, ma nécessité". Et je me souviens de cette interview sur France Inter où il racontait que sa mère était celle qui avait inspiré le roman "Jules et Jim".

Le texte "Indignez-vous", qui appelle à une insurrection pacifiste, est édité par Indigène Éditions et fait un carton : déjà 200 000 exemplaires. La spécialité de ce petit éditeur de Montpellier est l'indigène au sens très large : Aborigènes, Indiens d'Amérique, Inuits, Maoris, Papous, Tibétains… mais aussi "tous ceux qui, chez nous, se sentent les otages de systèmes culturels, politiques et économiques dans lesquels ils ne se reconnaissent pas".
Dans la même collection "Ceux qui marchent contre le vent" (textes militants en faveur d'une révolution des consciences à 3 euros), on trouve aussi "Je suis prof et je désobéis", "L'art de vivre au maximum avec le minimum"...
Indigènes de tous pays, indignons-nous !

Indigène Éditions, 2010, 30 pages.


samedi 20 novembre 2010

Comment aborder Nietzsche sans se fatiguer

Vite dit, d'aborder Nietzsche sans se fatiguer... Nietzsche, Se créer liberté s'adresse plutôt à des lecteurs qui ont déjà un minimum de références. Ne serait-ce que pour comprendre que, par exemple, le personnage de Paul est Paul Rée, que celui de Lou est Lou Salomé. Quoique, l'horrible sœur détestée nous le confirme à la fin...
Personnellement, cela me donne envie d'en savoir plus, d'entrer dans les détails. Justement, la BD serait-elle parfois une porte d'entrée vers des œuvres plus complexes ?
En attendant, moi qui ne suis pas une lectrice de BD, je me suis laissée absorbée par l'ambiance de ces dessins, souvent sans bulles. Le dessinateur Maximilien Le Roy s'est inspiré d'un script cinématographique de Michel Onfray : L'innocence du devenir, La vie de Frédéric Nietzsche. Il a aussi suivi les traces du philosophe allemand en voyageant en train à travers l'Allemagne, la Suisse et l'Italie, d'où ces paysages et ces nombreuses gares, comme un fil conducteur. Et ces scènes silencieuses qui en disent long sur l'isolement d'un homme préoccupé par sa recherche, incompris de son vivant et trahi par sa sœur.
À suivre, donc, puisqu'il s'agit du tome 1 (signe d'une suite annoncée ?).

Éditions Le Lombard, 2010, 126 pages.

vendredi 19 novembre 2010

J'ai aimé "J'ai grandi"

Oui, j'avoue, je débarque : je "découvre" Christian Garcin. Combien d'auteurs quasi inconnus (de moi seule, peut-être...) et qui ont publié plus de trente ouvrages ? Comme quoi, on parle toujours des mêmes...
Donc, je le découvre en lisant un livre passionnant regroupant une série d'entretiens avec des écrivains qui parlent de leurs grands-parents (À nos aïeux de Sylvie Tanette, judicieusement offert par mon amie Nadine).
Est-ce son séduisant portrait qui m'attire ? Son enfance à Marseille ?
Je cours à ma bibliothèque préférée (L'Alcazar) et j'emprunte notamment J'ai grandi.
Quelle trouvaille ce style, aussi alambiqué et savoureux que Proust, avec cette mise en page astucieuse en paragraphes qui permettent des digressions sans perdre le fil du récit !

Éditions Gallimard, Collection L'un et l'autre, 2006,168 pages.

dimanche 7 novembre 2010

Suivez les guides

Vous cherchez des idées de lectures, si possible passionnantes ?
Moi aussi ! 
Un bon filon est de suivre les conseils des écrivains que vous aimez : dans les interviews, on leur demande souvent quels auteurs les ont eux-mêmes influencés, leur ont donné envie d'écrire, ou quels livres ils auraient aimé écrire... 
Dany Laferrière cite souvent les auteurs qu'il aime et je sais que je vais les aimer aussi. 
Mais, alors que je ne suis pas passionnée par les livres de Philippe Djian (néanmoins fan de ses chansons pour Stephan Eicher), je lis avec plaisir ses interviews sur sa façon d'écrire et ses goûts de lecture. Par exemple, dans le magazine Lire, il citait Jay McInerney : "Je viens de finir son dernier recueil de nouvelles, Moi tout craché : j'aurais aimé l'écrire.
Hop ! je suis le guide, et en effet : c'est sidérant ! Moi aussi, j'aimerais bien avoir ce talent et son humour pour décrire ce type ivre dans une boîte de nuit qui fuit sa solitude dans la drogue et les sorties nocturnes et qui a finalement un brin de lucidité pour se rendre compte de sa vanité et des rencontres illusoires où cela l'entraîne. Et d'autres personnages incroyables mais si bien crachés dans les autres nouvelles...

Éditions de l'Olivier, 2009, 304 pages.

vendredi 5 novembre 2010

On n'est pas sortis de la bibliothèque !

On parle beaucoup de certains livres sans les avoir lus et les plus virulents adversaires sont souvent ceux qui n'ont pas ouvert une page.
Je me suis donc dit : "Tiens, je vais lire le pavé (dans la mare) du philosophe Michel Onfray sur Freud : Le crépuscule d'une idole, l'affabulation freudienne."
Ah ! il n'y va pas avec le dos de la pelle... L'avantage, c'est qu'il écrit très bien et que le style est clair. C'est séduisant. On ne demande qu'à croire sa méthode d'avoir lu l'œuvre complète, les correspondances et les biographies, et d'apporter un éclairage différent...
Mais du coup, on se demande pourquoi il a besoin de frapper si fort : l'idole est-elle si solide ou les croyances si profondément ancrées ? Certainement.
Dans la foulée, j'ai lu aussi la réponse à la tentative de démolition : Mais pourquoi tant de haine ?, d'Élisabeth Roudinesco, historienne et psychanalyste. Elle est convaincante, elle aussi, apparemment plus apaisée donc plus crédible.
Alors que croire ?
D'aucuns prétendent que les traductions déforment les propos : pour comprendre Freud, il faudrait lire Lacan, Deleuze, Derrida... Et dans la foulée, "Le livre noir de la psychanalyse", puis "L'anti livre noir de la psychanalyse"...Vaste programme qui ne laisse entrevoir que la surface de l'iceberg !
Vu à Marseille, dans une traverse.
On n'est pas sortis de la bibliothèque !

PS : Je viens d'apprendre que Michel Onfray répond à son tour avec "Apostille au crépuscule" que j'attends de lire avec impatience quand il sera disponible à la bibliothèque...
Affaire à suivre !

lundi 1 novembre 2010

Pina Bausch, toujours là !

Que l'on connaisse ou non Pina Bausch, ce documentaire est très émouvant. Des adolescents reprennent un des spectacles de la chorégraphe allemande, sous la direction de deux danseuses de la compagnie du Tanztheater. Issus de différentes écoles de la ville de Wuppertal, ils n'ont jamais dansé et se lancent dans l'aventure. C'est leur cheminement que les réalisateurs, Anne Linsel et Rainer Hoffmann, ont filmé en 2008 dans "Les rêves dansants, sur les pas de Pina Bausch". La grande dame apparaît peu dans le film et pourtant sa personnalité plane en permanence.
Ceux qui connaissent le travail de celle qui a inspiré toute la danse contemporaine depuis les années 70, retrouveront avec émotion ce style bien à elle qui met en scène toute l'étendue des rapports humains, de la tendresse à la violence... Ce n'est pas seulement de la danse, pas tout à fait du théâtre, puisqu'elle a complètement révolutionné le genre, au-delà de l'expression corporelle, qui inclut des fragments de scénettes, voire des gags, la parole ou le cri, la poésie ou le choc du geste, le quotidien et l'extraordinaire.
Depuis la disparition en 2009 de la chorégraphe, les danseurs de la compagnie continuent à monter son œuvre, soit plus de 40 spectacles.
Ouf ! Pina Bausch est toujours là.