dimanche 8 juin 2014

Le mystère Modiano

Entre hier et aujourd'hui, entre oubli et mémoire, entre fiction et réalité, par un jeu de miroirs, Patrick Modiano, dans L'herbe des nuits, évoque sa relation avec Dannie et ses fréquentations floues, voire criminelles — dont il savait si peu de choses et s'en accommodait à l'époque. Le mystère flotte toujours, d'autant que les scènes sont souvent nocturnes.
Grâce aux notes d'un carnet noir, les bribes de souvenirs remontent par strates, réalistes ou littéraires. Il revient notamment dans le quartier Montparnasse, autour de la rue d'Odessa, et se souvient d'une période de sa jeunesse, dans les années 60 de la décolonisation. Avec le recul, les lieux prennent une atmosphère encore plus particulière, dans un sentiment d'attente permanent, des situations troubles, secrètes, cachées.
Comme une variation sur les mêmes thèmes, on retrouve avec délectation les sujets de l'identité et des périodes troubles de l'adolescence et de l'Histoire chers à Patrick Modiano, livre après livre.
"Vous déchiffrez enfin, grâce à un code secret, ce que vous avez vécu dans la confusion, sans bien le comprendre... Un trajet en voiture, la nuit, tous feux éteints, et vous aviez beau coller votre front à la vitre vous n'aviez aucun point de repère. Et d'ailleurs, est-ce que vous vous posiez vraiment beaucoup de questions sur le but du voyage ? Vingt ans après, vous suivez la même route, de jour, et vous voyez enfin tous les détails du paysage. Mais à quoi bon ? Il est trop tard, il n'y a plus personne."

Éditions Gallimard, Collection Folio (n° 5775), 2014, 176 pages.

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