lundi 5 février 2018

Et lire, c'est voyager

Ça ne va pas toujours de soi. D'avoir une fenêtre. En Sibérie, il avait habité pendant des semaines une cabane qui n'avait qu'une porte et une trappe pour l'aération. Et le conduit de la cheminée pour la fumée. Ça lui convenait bien. Mieux que la plupart des logements habités au cours de sa vie. Lui qui si souvent vit sans fenêtres. Pas dans une yourte, mais en lui-même.
Au cœur du roman d'Eleonore Frey, En route vers Okhotsk, se trouve un autre livre, également intitulé En route vers Okhotsk. Ce dernier, et dont on peut lire quelques extraits, fait sensation depuis des mois en librairie.
Il fascine les personnages du roman qui parlent tous d'aller à Okhotsk — en soi, rêver d'aller en Sibérie, c'est une drôle d'idée, une idée d'écrivain, et c'est probablement pour cela que le roman d'Eleonore Frey intrigue.
Il envoûte : on y pense, on en rêve longtemps après (j'ajoute cette phrase des semaines plus tard — magie du blog et d'internet qui permet de reprendre un texte — alors que je réalise à quel point l'atmosphère de ce roman m'imprègne encore et suscite une nostalgie heureuse).
Partir, ils en rêvent, comme Robert (pourtant le véritable auteur du livre dans le livre) qui ne sait jamais trop où il va. Ou comme Otto, qui envisage aussi le voyage et lit également un autre livre dans le livre : le rapport d'un médecin sur un voyage vers Okhotsk.
Tous deux veulent y emmener Sophie la libraire qui referait bien sa vie et se pose beaucoup de questions. Tout se dédouble et se relie dans ce roman, s'enroule dans une spirale magnétique.
Mais qui ira vraiment là-bas, au bout de ses rêves et dans ce bout du monde ? 
Rêver, c'est partir un peu, c'est sortir de soi — grâce à la littérature. Et parfois ce n'est pas la destination qui compte mais la route, la lecture.
Et lire, c'est voyager.
En route vers Okhotsk est un roman qui marque durablement, comme le livre au même titre qui inspire, aspire ses personnages et donne envie de reprendre la route, ce qui signifie pour le lecteur de relire le roman, de se laisser à nouveau emporter par son énergie, par sa magie — un magnétisme confirmé par la superbe couverture.

Quidam éditeur, traduit de l'allemand (Suisse) par Camille Luscher, 2018, 152 pages.

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